Pierre Bondu


Interview réalisée le 18 juin 2004, à l’issue de Show Case donné par Pierre Bondu, à la FNAC de Nantes.

Si beaucoup sont passés à côté de son premier album, « Ramdam », il y a déjà 5 ans, Pierre Bondu est devenu un acteur essentiel de la nouvelle scène française. Il vient de sortir « Quelqu’un, quelque part », album de pop orchestrale déjà remarqué par la qualité du travail mené avec l’orchestre d’exception qu’il a utilisé : le Bulgarian Symphony Orchestra…
Se prêtant, avec tension, au jeu du show case, Pierre Bondu a donné un set revisitant son album aux orchestrations luxuriantes, accompagné pour l’occasion d’un simple piano ou d’une guitare. Les morceaux se livrent alors dans leurs plus simples atours, les orchestrations ambitieuses rendant leur place au compositeur.
Toujours prompt à tenter l’exercice de la reprise, il a revisité également un titre de Holden et de Silvain Vanot, des voisins avec lesquels il partage au moins quelques références et sans doute une certaine retenue stylée. On sent que, malgré les quelques 200 concerts auprès de Dominique A, les arrangements pour lesquels il a été reconnu (Miossec, Breut, Katerine…), c’est un artiste encore vierge qui se présente sur scène puisqu’il s’y aventure finalement depuis peu pour son propre compte…
On avait convenu de parler, pour le site, des liens qu’il avait entretenu avec Daniel Darc, dont je savais qu’il avait croisé plusieurs fois la route, se fendant même d’une cover élégante. On a bien entendu également évoqué la gestation de ce nouvel album qu’il nous a livré

Tu as fait une adaptation de « Chercher le garçon », version quatuor à cordes : que représente pour toi cette chanson et que penses-tu du résultat ?

Pourquoi je l’ai repris ? La première raison, c’est que je trouve que c’est une chanson formidable. La deuxième raison, c’est que je cherchais une reprise à faire qui soit adaptable en quatuor et j’avais eu cette idée il y a déjà un moment. C’était quand j’avais travaillé sur le film de Catherine Corsini [ « La répétition » ] avec Fabrice Dumont, pour faire la musique. A un moment donné, dans le film, on entend « Chercher le garçon » et, comme ça faisait un moment que je ne l’avais pas entendue, en la réécoutant, à travers le film, je me suis dit « Ca serait super de l’adapter, ça marcherait super bien dans une formule quatuor à cordes » parce que toutes les voix et les mélodies qui sont jouées par l’orgue, par la basse… tout ça pouvait bien s’intégrer pour un quatuor à cordes. C’était ça, la deuxième raison. Et puis… je pense que j’en ai fait un truc pas mal (rires)

Je ne l’ai pas entendu, malheureusement…

Tu ne l’as pas entendue. En fait, je n’ai eu que des super échos donc…

Seulement, elle ne figure nulle part, il me semble.

Non. Mais PIAS aimerait bien l’enregistrer pour la sortir comme un inédit ou quelque chose comme ça et j’aimerai bien partir une journée en studio, pour enregistrer des chansons à moi, mais des versions différentes au piano, comme je l’ai fait tout à l’heure et aussi des versions acoustiques et j’y ajouterai cette reprise. Ca serait bien. J’aimerai vraiment.

Je crois me souvenir que tu m’avais dit, il y a longtemps, que tu étais le voisin de Daniel Darc, il y a quelques années, à Paris. C’est quel genre de voisin ?

On n’était pas « voisins/voisins », dans le sens où son appartement n’était pas contigu au mien. En fait, j’habitais au 4 et lui habitait au 10 rue « X ». Il habitait chez sa mère, à l’époque. Et, ce qui est bizarre c’est que l’on se voyait un petit peu, à l’époque, parce qu’il aimait vachement ce que faisait Dominique. Il y a un petit café, en bas de la rue, on s’y retrouvait souvent. Ou on y allait et puis il y avait Daniel Darc qui passait, qui venait. Donc, voilà, on a parlé un petit peu mais je l’ai revu il y a quelques mois mais je pense qu’il ne m’a pas reconnu et je n’ai pas osé aller le voir… je ne sais pas, peut-être qu’il en avait un coup dans le nez, je ne sais pas. A un moment, je l’ai regardé dans les yeux et il m’a regardé, ça m’a semblé évident qu’il ne me reconnaissais pas et j’ai laissé tomber. Mais, on se connaissait très peu, on n’a peut-être que quatre fois vraiment pris un verre ensemble… Sinon, c’étaient de petits « croisements ». Plus d’une fois, je me rappelle de l’avoir entendu jouer de l’harmonica, le soir. A l’époque, je travaillais dans un petit restaurant où je faisais la plonge et, vers une heure du mat’, je rentrais chez moi et, souvent, je l’entendais rentrer chez lui aussi et puis il se mettait à jouer de l’harmonica. Voilà, c’est le souvenir que j’en ai… Je me rappelle d’autres petites choses : je l’ai vu la veille du jour où il faisait les photos pour « Nijinsky », parce qu’il sortait du pressing et que, moi, j’y allais. Il avait fait nettoyer et repasser son costard, on avait parlé un peu… C’est pas une anecdote formidable (rires) mais je te dis ce qui me passe par la tête !!

Cette époque, c’est juste avant « Nijinsky », c’est à cette période-là que Dominique, dont tu parlais, l’avait aussi invité à le rejoindre sur scène. Je crois que toi aussi tu l’accompagnais à ce moment là.

Oui, c’était à la Flèche d’Or. Je jouais avec lui sur la tournée, nous étions quatre avec Sacha, toute cette bande-là, les Belges… Comment ça s’était passé ? Qu’est-ce qu’on avait joué avec lui ? Je crois que Dominique avait joué tout seul avec lui. Nous, on était sortis du plateau… Je pense qu’ils avaient joué « Je suis déjà parti ». Il me semble que c’est ce qu’ils avaient fait. Tu demandera à Dominique, il t’en parlera mieux que moi : il était archi-fan ! Il connaît bien mieux que moi. Moi, je connais surtout les tubes : Mannekin, Aussi belle qu’une balle... J’ai pas d’albums, pas de compilation. Le souvenir que j’en ai est que ça devait être plutôt pas mal car il était plutôt en forme. Et puis, il était très content de refaire de la scène parce que, tu sais, il y a une période où il ne faisait plus grand chose. En fait, avant « Nijinsky »… et puis après, aussi, il ne s’est pas passé grand chose, ça n’a pas trop marché, il y a eu une sorte de trou. Moi, j’étais loin de penser qu’il referai quelque chose.

Pour rester sur l’axe Dominique A/Daniel Darc, récemment Dominique disait que « Crève Cœur » était un disque qui le motivait beaucoup et qu’il tenait « Crève Cœur » pour l’antithèse de « Tout sera comme avant » : un disque très arrangé, de son côté, un disque « nu » de l’autre, des textes de plus en plus « littéraires » en ce qui le concerne et des textes toujours plus épurés, du côté de Daniel… Quelle comparaison tu ferais entre « Quelqu’un, quelque part » et « Crève Cœur » ? Puisque je t’y oblige !

(rires) C’est dur, ça. C’est très, très dur. A priori, je ne vois aucun point commun. Ce sont deux disques très différents (Silence reflexif) Il y a peut-être un petit point commun par rapport non pas au propos mais sur les choix de thèmes introspectifs. Mais… C’est très différent : l’album de Darc, il est très basé sur des samples, de la répétition… Il n’y a que l’utilisation, sur quelques morceaux, d’un clavecin qui donne ce côté « cinéma ». Un plantage de décors…

Les traces de John Ba rry ou Ennio Morricone…

Oui. Et puis, son disque est beaucoup plus souple que le mien, vachement plus rond . Moi, c’est assez carré. Même mon placement de voix est assez carré. Lui, il a une souplesse de voix qui est super belle. Qui est assez libre. Là où moi, je suis encore assez… appliqué. C’est un petit défaut que j’ai… Parmi d’autres défauts… Mais s’il y en avait un en particulier, c’est celui-là. Après, je trouve qu’il a des textes formidables. Je ne renie pas les miens mais je trouve que quelque chose comme « Mes Amis », par exemple, c’est une super chanson. Vraiment super belle. Au niveau de la voix, il y a un lien. Moi, quand j’étais petit, en entendant Daniel Darc, en entendant Daho chanter comme ça, parce qu’ils sont un peu de la même génération, ils ont même bossé ensemble sur « La Ville », cet état d’esprit où on chantonne plus qu’on ne chante… Je dois ça a des gens comme lui, comme Daho, évidemment comme Gainsbourg… Comme Murat. Je ne sais pas si je réponds à ta question, je ne sais pas si tu es content de ma réponse, c’est difficile…

Si, bien sur. Et c’est difficile, d’ailleurs, la comparaison de Dominique, elle soulignait surtout l’antithèse…

Oui. Mais l’antithèse, je la vois bien : ce sont deux disques très différents.

Toi qui est très reconnu pour tes arrangements, que ce soit ceux pour Katerine ou pour Miossec, et puis les tiens, quand tu entends un disque comme « Crève Cœur », as-tu envie de le réarranger, d’y ajouter une dimension ?

Non, je trouve que ça se suffit complètement. Ca n’a rien a voir avec ça. Sinon, tu peux t’amuser a remettre en perspective les disques du Velvet et ceux des Beatles. Toutes proportions gardées, hein : je ne me prends pas pour ces groupes là ! Juste dans le sens où ce sont des disques de la même époque. D’un côté, tu as le Velvet, où tu as un truc très libre avec des super chansons au bout. De l’autre côté, tu as de superbes chansons aussi, les Beatles, avec cette sorte de producteur qui était Georges Martin, qui organisait les choses. Et ils existent chacun pour des raisons indépendantes. Quand tu a affaire avec deux disques pareils : l’album avec la banane et, à côté, « Revolver », tu ne peux pas te dire que l’un est meilleur que l’autre parce qu’il y manquerait ceci ou cela. Ce sont d’emblée des pièces assez uniques, des albums assez massifs – dans le bon sens du terme : pas parce qu’il y aurait trop d’informations mais ce sont d’emblée des chefs d’œuvres. Donc, ce genre de réaction, tu peux l’avoir sur des disques d’aujourd’hui, évidemment. Je réécoutais le disque de Dominique dans le train, ce matin, et quand je pense au disque de Daniel Darc, c’est pareil, je ne me dit pas : « vachement bien » ou je ne sais pas quoi, sur le disque de Dominique A et « il n’y en a pas sur le disque de Daniel Darc, ça manque » ! Non, ce sont des disques massifs, qui marchent comme ça. Je me suis pris ces deux disques là dans la beigne et c’est super. Tu les entends, tu as envie d’aller bosser et de faire aussi bien qu’eux, quoi ! J’ai beaucoup aimé ses interviews, notamment celle de Magic !, je suppose que tu l’as lue. Vraiment super : ça faisait longtemps que je n’avais pas lu une interview un peu franche, avec du contenu, des trucs très beaux et en même temps vachement d’humilité. Ca m’a assez impressionné qu’il parle de la Bible et tout ça. C’est fou !

Comment vois-tu la suite de ton parcours, justement, comme celle de « Tout sera comme avant » ?

Non, là, j’aimerai aller vers autre chose, figure-toi. J’aimerai bien faire un disque un peu dansant. Qui donne aux gens envie de danser, en fait (il sourit à cette idée) Mais pas un truc festif français, je veux à tout pris éviter ce côté-là : Louise Attaque, Tarmac. Je verrais un truc comme, je ne sais pas… J’adore l’album de Phoenix, par exemple. De la musique qui donne envie de danser. J’aimerai aller vers ça. Ca ne veut pas dire qu’il n’y aurait pas de violons, ni rien mais aller vers ça. Mais je n’ai pas encore commencé.

Ca pourrait ressembler aux morceaux les plus funky de Murat, comme « Le cri du papillon » ?

Je suis incapable de te le dire. Mais peut-être un peu avec ce dosage-là, effectivement. Je me méfie en même temps : si ça se trouve, on se reverra dans trois ans et là, à la place, j’aurai fait un truc super tristounet ! Il y a quelques morceaux d’écrit mais rien d’enregistré… Il y a l’envie.

Des morceaux que tu joueras dans la tournée ?

Non.

Tu quitteras sans doute les formules orchestrales

Oui, j’aimerai bien faire ça : jouer sur la rythmique, qu’il y ait plus de guitares…

Tu as annoncé que tu allais changer de tourneur, de distributeur… Le métier de chanteur, c’est un métier de précaire ?

Exactement, cher ami ! Et c’est pour ça que c’est bien. Parfois. J’aimerais que l’on puisse récupérer la licence du premier album [ « Ramdam » ] qui est bloquée pour le moment. On fait quelques concerts à deux, avec Eric Deleporte, de Pério, et on reprend des chansons du premier, des choses que j’aime bien, et les gens me demandent : « ça vient d’où, ces chansons? ». C’est dommage. Alors, maintenant, je le dis avant de les jouer. Mais ça m’emmerde qu’on ne puisse pas le trouver : il n’y en a pas un seul exemplaire en stock, à part dans les solderies… Alors de temps en temps, j’ai bien quelqu’un sur mon site qui me dit « j’ai trouvé ton premier album »… A dix francs !! On a du en vendre 900, ou quelque chose comme ça, alors…

« Quitter la terre », ça m’a rappelé Epic Soundtracks, des chansons comme « She leaves alone », quelque chose qui s’appuie sur du songwriting mais qui s’entoure d’arrangements assez ambitieux…

Je ne connais pas…

C’est un type qui était dans un antique groupe punk, les Swell Maps.

Ca, je connais. Et Epic Soundtracks, je connais le nom…

Il a fait un disque qui a eu de l’écho, ici, vers 93/94, avec des membres de Sonic Youth, avec J.Mascis de Dinosaur Jr, à la batterie, un membre de Primal Scream… Un univers, sur ce disque, « Rise Above », qui me semble avoir des points communs avec le tien : des chansons avec du développement, des arrangements sans dérives pompeuses. Mais je pense que ça ne se trouve plus en magasin…

Je vais essayer de chercher quand même, du côté de chez Gibert. Pour ce disque, on m’a parlé de Prefab Sprout mais je ne connais pas bien non plus.

Pour faire d’autres comparaisons faciles, j’ai l’impression d’un changement entre tes deux disques, qui se traduit jusque sur la pochette : « Ramdam », où tu apparais flou et caché, et « Quelqu’un, quelque part » où tu commence à te dévoiler même si tu te caches encore un peu avec la main…

Oui, tout à fait. C’est complètement délibéré. C’était aussi pour être plus cohérent par rapport à ce que je racontais. Miossec n’a pas arrêté de me gonfler avec cette pochette [ « Ramdam » ], il me disait que j’avais perdu, genre trois ou quatre milles exemplaires !!

C’est donc un type qui discute « nombre d’exemplaires »…

Mais bien sur. On est tous à parler d’exemplaires, c’est vachement important… Faut pas croire. Les gens qui disent qui s’en foutent de ne pas vendre de disques, c’est pas vrai ! Daniel Darc, peut-être pas, en fait. Parce que, lui, il doit tout prendre dans la gueule, d’un coup ! Le fait que son disque soit très bien accueilli, le fait qu’en plus il soit vachement bien… Il doit être un peu au dessus de tout ça…
Ce qui est vachement bien, c’est qu’on a l’impression qu’il se sont retrouvés autour d’une table, avec Frederic Lo, avec quelques éléments dessus : un petit orgue, trois jacks – boum ! – des samples et « qu’est-ce que l’on peut faire avec ça ? ». Et ils ont réussi, je trouve à trouver l’agencement correct, et l’inspiration, pour que ça amène cette fluidité dans le disque, d’honnêteté dans ce que Daniel Darc raconte. Une chanson comme « Mes Amis », c’est super, car tu sens que c’est très tendre le regard qu’il pose là-dessus et, en même temps, c’est cinglant ! Putain, si t’es un de ses amis !

Si tu fais du sport ou si tu t’es marié !

Oui ! C’est assez beau en même temps, cette façon de l’amener, un côté « petit garçon »… Il y a un côté « petit garçon », dans cet album … J’ai remarqué que des mecs comme lui ou comme Miossec, des mecs qui ont un peu de bouteille, sans mauvais jeu de mots (rires), ils ont vraiment ce côté … « enfant »… Je ne sais pas si tu trouves ça chez Daniel Darc ?

Oui, le côté quasi « 16 ans d’âge mental »

Oui, un peu… et il y a un côté « frais ».

Quelque chose de naïf qui fait assez années 80

Je l’ai vu à la télé et c’est vrai qu’il y avait comme des codes, des attitudes « années 80 ». C’est vrai… C’est une super histoire, c’est comme pour Mirwais. C’est un autre genre mais c’est très bien aussi.

Est-ce que tu es sollicité sur des musiques de films, il y a un côté cinématographique dans ta musique. En particulier le morceau d’ouverture et de fin de l’album…

Pas pour le moment. Il y a peut-être quelque chose mais rien n’est fait alors je préfère ne pas en parler. Mais j’aimerai que ça donne des idées à des réalisateurs. Pas pour l’instant.

Je t’en ai parlé pour Daniel tout à l’heure mais, toi-même, quand tu entends le disque d’untel, tu n’as pas envie d’y amener ton style d’arrangements ?

J’ai un peu de mal avec ça, en fait. Parce que je suis un gros solitaire, j’aime vraiment travailler tout seul. J’avais fait une chanson avec Miossec, ça c’était bien passé mais je me vois plus travailler sur des petites musiques de films, de courts-métrages… J’ai du mal à déléguer et puis je suis vraiment hyper pénible dans le travail. Je suis hyper maniaque. Et puis, je suis un gros bosseur. Tu te retrouves avec des mecs qui te disent « tu crains, c’et pas rock’n’roll ». Avec Philippe Katerine, c’était vraiment agréable parce qu’il te laisse carte blanche, c’est vraiment cool. Françoise Breut, ça c’est bien passé aussi. Miossec, ça a été aussi. Donc, dans l’ensemble, ça va. Mais c’est moi : je suis obligé de me conditionner, ça me gonfle un peu. Et puis, je ne suis pas un « vrai » arrangeur, au sens des mecs dans les années 60, qui passaient d’un projet à un autre… Des mecs comme Vannier le faisaient sans problème parce que c’étaient des grosses bêtes mais moi, j’aimes limites aussi. Quand on te file une chanson, tu es obligé de t’adapter à la grille alors que, quand je fais mes chansons, j’avance frontalement mais je sais où je vais : j’ai en tête les arrangements qui vont permettre de déterminer le pont, et le pont va solliciter une autre idée, tu vois… J’avance frontalement avec plein d’éléments. Alors que, quand on t’amène une chanson toute faite, tu es déjà cloisonné dans un truc qui peut me bloquer. Je ne suis pas si à l’aise. Par contre, pour une BO, ce que j’aime, c’est qu’après tu peux sortir un disque… même si ça ne s’est pas fait pour « La répétition » dont j’ai fait la musique. Mais je l’ai mise en ligne sur mon site, comme elle n’existe nulle part… Les gens peuvent l’écouter si ça les amuse.

Le film sur l’enregistrement est très bien, d’ailleurs. L’orchestre vient des pays de l’Est, c’est pour des raisons de budget ?

Pour deux raisons. Je les connaissais déjà car j’y étais allé pour le film de Catherine Corsini. On était allé là-bas parce que c’était moins cher et puis l’orchestre était plus disponible à cette époque là. Ca s’est super bien passé, la salle de prise de son est magnifique. C’est moi qui ait branché Dominique sur cet orchestre, pour qu’il aille là-bas. Comme ça s’était bien passé là-bas : les gens formidables, la salle de prise de son parfaite, je voulais retravailler avec eux… La salle, c’est un vieux studio, stalinien, tout en bois, super haut de plafond, comme il y avait à Paris il y a une certaine époque… sauf que, là-bas, ils n’ont rien détruit. Le son est vraiment incroyable. Techniquement, ce n’est pas ce que l’on a en France mais ça va. Le chef d’orchestre, il y en a deux, tu choisis celui que tu veux. Ils coopèrent vachement bien. C’est des grands musiciens. Tu sais combien on a mis de temps pour tout enregistrer ? En cinq heures et demi !! Toutes les cordes en cinq heures et demi : deux prises pour chaque chanson, parfois une seule prise. Avant que les musiciens arrivent, j’ai juste passé deux heures à relire les partitions avec le chef d’orchestre pour lui montrer ce que je voulais, au piano, je lui montrait des parties, lui-même se mettait au piano. Quand les musiciens sont arrivés, ils ont mis leurs casques, on a lancé la bande et en cinq heures et demi, c’était plié. Super ! Pourtant, dans l’avion, je m’étais préparé à être déçu, à ne pas avoir le temps de toute faire… Ils sont cinquante alors si il y en a trois qui font des fausses notes, j’avais prévu une organisation pour sauver les meubles si il y avait des problèmes. En fait, on a fini un heure et demi avant le délai qui nous était accordé. Je ne jouais pas, j’ai passé les bandes enregistrées à Paris et je les ai regardé travailler… En me disant, c’est bien ce que j’avais prévu : c’est jouissif !

Tu as du te sentir un mélange de Scott Walker et de Lee Hazlewood !

Oui… mais sans la voix ! C’est vrai, surtout en ré écoutant le lendemain, je me disais, c’est cool, ils ont super bien joué ! C’est la fête, quoi !! On n’avait pas un budget énorme mais du coup on a pu se concentrer sur le mixage. On se connaît un petit peu maintenant. Des gens comme Dominique ou moi, ou d’autres… Plein de français y vont… Ca profite à l’orchestre, les gens se passent le mot.